Éclairage Juridique

Garanties légales et contractuelles : les comprendre et les appliquer

Rédigé par Mathilde Attebi,

Paru dans Gesec Magazine 268 Hiver 2024

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Vices cachés, défaut de conformité, garantie décennale… En matière de travaux, le régime
des garanties peut sembler complexe pour les professionnels. Pourtant, ces obligations légales sont au cœur de votre activité et constituent un enjeu majeur dans la relation avec vos clients.

Décryptage des principales garanties qui encadrent votre responsabilité professionnelle.

Garanties légales en cas de fourniture d’un bien

Dans le cadre de la fourniture d’un bien, les garanties légales offrent une protection essentielle, surtout pour le client particulier. En tant que professionnel, vous devez informer vos clients de leur existence et de leur fonctionnement. Cela prend généralement la forme d’une mention dans les conditions générales de vente.

Garantie des vices cachés

(art. 1641 et suivants du Code civil)

Cette garantie protège les consommateurs et les professionnels contre les défauts non visibles, présents avant l’achat et qui rendent le matériel inutilisable ou en réduisent fortement l’utilité. Il appartient au client d’apporter la preuve de l’existence du défaut ainsi que de son antériorité, dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. En cas de vice avéré, le client peut soit restituer le bien contre un remboursement intégral, soit le conserver avec une réduction de prix.

Garantie légale de conformité

(L217-3 à L217-20 du Code de la consommation)

Valable deux ans pour les clients particuliers uniquement, cette garantie couvre les défauts qui empêchent l’usage normal du bien ou ne correspondent pas aux caractéristiques convenues. Le défaut est présumé exister au moment de l’achat, sauf preuve contraire du vendeur. En cas de problème, le client peut exiger réparation ou remplacement, ou, si cela est impossible, une réduction du prix ou un remboursement. En cas de réparation, la garantie est prolongée de six mois, et de deux ans en cas de remplacement.

Garanties après réception d’un ouvrage

Lorsque qu’un ouvrage est réalisé, les garanties suivantes s’appliquent dès sa réception. À défaut de réception, les garanties ne commencent pas à courir et l’entreprise reste responsable de la garde d’ouvrage ainsi que des éventuels dommages pouvant survenir.

La notion d’ouvrage n’est pas définie précisément par les textes, mais en pratique il s’agit de la construction de bâtiments, fondations, structures, ainsi que les équipements indissociables de l’ouvrage (comme les systèmes de chauffage intégrés). Ce sont des éléments qui ne peuvent être retirés ou remplacés sans endommager l’ensemble de la construction.

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Réception : acte par lequel le client accepte les travaux, avec ou sans réserve (art. 1792-6 du Code civil). Il est recommandé de formaliser systématiquement la réception par un procès-verbal signé des deux parties, y compris lorsque vous intervenez chez des clients particuliers.

Il existe trois garanties après réception :

Garantie de parfait achèvement

Elle couvre durant une année les désordres apparents signalés pendant la réception ou non apparents notifiés dans l’année (art. 1792-6 du Code civil).

Garantie de bon fonctionnement

Appelée aussi « garantie biennale », elle couvre pendant deux ans les désordres portant sur un élément d’équipement dissociable de l’ouvrage, capables de fonctionner (élément non inerte, par exemple. chauffe-eau, climatiseur ou chaudière – Cass, Civ 3, 12 mai 1982, n°80-14.372) (art. 1792-3 du Code civil). Cependant, cette garantie ne s’applique pas aux éléments adjoints à des ouvrages préexistants, par exemple une pompe à chaleur installée à un ouvrage existant (Cass. Civ 3e., 12 novembre 2015, n° 14-20.915).

Garantie décennale

Elle couvre pendant dix ans les désordres portant atteinte à la solidité de l’ouvrage ou qui le rendent impropre à sa destination (art. 1792 du Code civil). Cette garantie impose au professionnel de souscrire à une assurance décennale.

En tant qu’installateur, même lorsque vous n’assurez pas la maintenance, vous restez présumé responsable au titre des garanties légales précitées. Vous pouvez toutefois vous exonérer, en tout ou partie, si les dommages à l’ouvrage résultent d’une intervention ultérieure du mainteneur. Celui-ci a une obligation de résultat et sa responsabilité est engagée uniquement si vous pouvez prouver sa faute.

Ce que la garantie décennale ne couvre pas

Au même titre que la garantie de bon fonctionnement, certains équipements ajoutés à un ouvrage existant ne sont plus couverts par la garantie décennale (exemple d’un insert de cheminée – Cour de cassation, Civ 3, 21 mars 2024, n°22-18.694). En cas de litige, c’est la responsabilité contractuelle qui trouve alors à s’appliquer. Celle-ci peut être engagée par le maître d’ouvrage dans un délai de dix ans (art. 1792-4-3 du Code civil). Il peut s’agir de dommages intermédiaires, tels que des fissures inesthétiques sur un carrelage, des coulures d’un revêtement d’étanchéité, un décollement de bac acier ou des infiltrations mineures. À la différence des garanties précitées pour lesquelles il existe une présomption de responsabilité, il faut ici que le client démontre que le dommage résulte d’une faute de l’entrepreneur.

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